ECCLÉSIASTIQUE (LIVRE DE L’)

ECCLÉSIASTIQUE (LIVRE DE L’)
ECCLÉSIASTIQUE (LIVRE DE L’)

ECCLÉSIASTIQUE LIVRE DE L’

Un des livres de sagesse de la Bible catholique, l’Ecclésiastique est regardé par les juifs et les protestants comme un «apocryphe de l’Ancien Testament». C’est pourtant un texte juif préchrétien d’une grande importance. Son nom lui vient d’un de ses manuscrits grecs, le 248, qui porte ce titre. Il est passé dans l’usage traditionnel par l’intermédiaire de l’ancienne version latine et des Pères de l’Église. Son véritable titre, celui qui lui est donné par l’ensemble des manuscrits grecs, est Sagesse de Jésus fils de Sirach , d’où vient l’habitude récente de dire simplement Ben Sira . Pendant des siècles, le livre fut connu seulement par les versions grecques (sous deux formes), syriaques et latines. En 1896, le texte hébreu, qui était encore connu de saint Jérôme et fut utilisé par les rabbins jusqu’au XIIe siècle, réapparut parmi les nombreux manuscrits découverts dans la Geniza (dépôt des livres saints hors d’usage) de la synagogue karaïte du Vieux-Caire. Les quatre fragments, complétés depuis lors par deux ou trois autres, représentent un peu plus des deux tiers de l’original. Plus récemment, on en a trouvé quelques fragments à Qumr n et, surtout, un long passage de cinq chapitres dans les ruines de Masada, la dernière forteresse des zélotes. L’auteur n’est pas autrement connu, mais il vivait probablement vers \ECCLÉSIASTIQUE (LIVRE DE L’) 180, si l’on s’en tient aux renseignements donnés par le traducteur grec, à la fin du règne de Ptolémée VII Évergète (\ECCLÉSIASTIQUE (LIVRE DE L’) 170-\ECCLÉSIASTIQUE (LIVRE DE L’) 117). Malgré le très grand intérêt du texte hébreu du Caire et de Masada, seul le texte grec conserve l’intégralité du livre. Son ancienneté et la multitude des exemplaires qu’il compte en font une source privilégiée pour les chercheurs. Mais les versions syriaques et latines ne sont pas à négliger.

L’ouvrage est très long (cinquante chapitres et un appendice), fort disparate au premier abord. C’est un mélange de deux genres littéraires: tantôt des «proverbes» se succèdent en un certain désordre, tantôt des développements structurés proposent des réflexions sur un sujet. Il s’agit pourtant toujours de la «Sagesse», représentée comme une personnification de la Sagesse divine: on fait son éloge, on montre son œuvre créatrice, mais aussi elle donne ses conseils au disciple soucieux de l’atteindre. Elle est pour celui-ci une mère, une épouse, une sœur. La rechercher, c’est atteindre Dieu. Vivre avec elle, c’est vivre avec Dieu. Cinq grands exordes divisent le livre aux chapitres I, XVI, XXIV, XXXII et XLII. Le plus célèbre est le chapitre XXIV, un des plus beaux textes de la Bible, qui contient l’essentiel de la doctrine de Ben Sira sur la Sagesse. La cinquième et dernière partie décrit l’action de la Sagesse dans la nature et dans l’histoire d’Israël; elle se termine par le magnifique éloge de Simon, fils d’Onias, qui est le «Simon le Juste» du Talmud (début du \ECCLÉSIASTIQUE (LIVRE DE L’) IIe s.). L’ouvrage est donc juif, et son auteur est un disciple de Simon le Juste, vénéré des rabbins. Pourtant, le judaïsme rabbinique l’a rejeté après discussion. Seuls les juifs alexandrins et les chrétiens l’ont considéré comme un livre saint. Il faut donc le rattacher à un courant relativement ancien et très traditionaliste, opposé au courant religieux d’où le pharisaïsme est issu. Puisque l’Ecclésiaste a été conservé et l’Ecclésiastique rejeté, on peut y voir deux manifestes opposés, élaborés à l’époque où se formaient les grands mouvements qui devaient aboutir aux «sectes» juives. L’Ecclésiastique doit-il être rattaché aux sadducéens? Son aspect mystique contredit cette idée. On peut cependant admettre, sans être plus précis, qu’il a pour origine un mouvement religieux duquel sont sortis les sadducéens et les esséniens, mais qui n’était pas encore dissocié de ce qui devait être le pharisaïsme. Il est certain néanmoins que le livre sort d’un milieu très hellénisé. L’influence grecque y est manifeste. Mais, à la différence de l’Ecclésiaste, où le courant épicurien domine, c’est ici le courant mystico-philosophique du néo-pythagorisme qui l’emporte. Le livre reste très juif, puisque la Sagesse est identifiée à la loi de Dieu; mais cette sagesse est distribuée par Dieu abondamment aux hommes, par une libre disposition de sa Providence. Il faut la chercher avec ardeur; Dieu la donnera. Tout cela évoque l’idée d’un «salut par la connaissance», c’est-à-dire d’une «gnose» au vrai sens du mot. Bien des détails viennent à l’appui de cette thèse: les développements sur les banquets, qui font penser aux thiases; le long chapitre sur le médecin, etc. L’utilisation du livre à Qumr n confirme encore ces vues, mais il est exagéré d’y voir une œuvre essénienne. En bref, on peut dire que l’Ecclésiastique vient d’un milieu palestinien d’où sont sortis ensuite, sous l’influence des événements politiques, les divers mouvements juifs d’Égypte.

Encyclopédie Universelle. 2012.

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